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Comm. de Presse Ve 20.08.14

Deus nouveaux venus dans la collection: August Gaul et Martin Lauterburg, 22.08.2014 - 11.01.2015

Des pingouins et des géraniums

La collection du Musée des Beaux-Arts de Berne s’est récemment enrichie de deux ensembles d’œuvres exceptionnels. Le premier appartient à la Fondation Zwillenberg (Berne) qui a confié au musée sa collection de cent vingt sculptures animalières de l’artiste allemand August Gaul (1869-1921) pour un dépôt de longue durée. La présentation de ces sculptures propose un aperçu de l’œuvre de Gaul qui s’affirma à Berlin, au début du XXe siècle, comme l’un des précurseurs de la sculpture moderne en Allemagne. Le second ensemble, quatre-vingt peintures et de nombreuses œuvres graphiques et photographiques du peintre bernois Martin Lauterburg (1891-1960), a rejoint la collection du musée à l’occasion de l’intégration de la Fondation Martin Lauterburg à la Fondation du Musée des Beaux-Arts de Berne. Une sélection d’œuvres de la Fondation Lauterburg augmentée d’œuvres déjà présentes dans la collection du musée invite à redécouvrir l’univers pictural d’un artiste très apprécié de son temps pour son réalisme magique.

La réunion des œuvres de Gaul et de Lauterburg dans une exposition commune, mais néanmoins scindée en deux parcours distincts, offre un espace de rencontre à deux artistes que tout oppose mais qui surent, chacun dans son domaine, construire une œuvre innovante et convaincante.

August Gaul, précurseur de la sculpture moderne
August Gaul compte parmi les précurseurs de la sculpture moderne en Allemagne. On lui doit d’avoir imposé l’animal comme un sujet digne de la même considération que la représentation humaine. Il produisit des sculptures monumentales en pierre et en bronze, mais aussi des sculptures de format plus modeste, voire de très petit format. A partir de 1893, il trouva dans les représentations animalières en bronze son thème de prédilection. Le Zoo et le Musée des sciences naturelles de Berlin lui fournissaient ses modèles qu’il commençait par dessiner, avant de les modeler, le plus souvent sur place cependant. Sa participation à l’Exposition universelle de Paris de 1900 lui assura une plus grande reconnaissance auprès des collectionneurs privés et des musées et une notoriété que la commercialisation de ses œuvres par le galeriste Paul Cassirer soutint activement. Gaul fut membre fondateur de la Sécession de Berlin, un groupe d’artistes réunis autour du peintre Max Liebermann.

De nombreuses sculptures d’August Gaul avaient rejoint la collection d’œuvres d’art que les Zwillenberg-Tietz, une famille d’entrepreneurs juifs de Berlin, avaient commencé à réunir en 1900. Par son mariage avec Else Tietz, Hugo Zwillenberg était entré en 1919 dans la société de grands magasins que dirigeait son beau-père, Oscar Tietz. Après la prise du pouvoir par Hitler en 1933, l’entreprise fit l’objet d’une vente forcée dans le cadre de l’« arianisation » et fut rebaptisée du nom de Hertie. La collection d’œuvres de Gaul ainsi que d’autres œuvres d’art et une partie du mobilier de la famille purent quitter le pays et passèrent la période de la guerre dans le port franc d’Amsterdam. Ces circonstances, auxquelles s’ajoute le fait que la famille veilla à ne jamais porter atteinte à l’intégrité de sa collection de cent vingt sculptures, en firent l’une des plus importantes collections d’œuvres de Gaul conservées à ce jour. Le Dr. Helga Zwillenberg (1930-2013), la fille d’Hugo Zwillenberg, et son frère le Dr. Lutz Zwillenberg (1925-2011) vivaient à Berne depuis 1959, où ils s’étaient installés en raison de leurs activités de recherche en sciences naturelles. Ils donnèrent naissance à la Fondation Zwillenberg en 2012 dans le but de préserver leur collection d’œuvres de Gaul. A l’été 2013, la Fondation Zwillenberg confia cette collection au Musée des Beaux-Arts de Berne pour un dépôt de longue durée.

Martin Lauterburg : un peintre brillant entre réalité et imaginaire
Né le 14 mai 1891 à Neuenegg, Martin Lauterburg passa son enfance à l’orphelinat de la Bourgeoisie de Berne à la suite de la mort précoce de son père. Il fit ses études secondaires au Freies Gymnasium et prit ses premiers cours de peinture auprès du peintre du paysage Ernst Linck. Il s’installa à Munich en 1910, où il fréquenta l’Ecole d’arts appliqués et devint membre de la Nouvelle Sécession. Il revint à Berne en 1935 et y vécut jusqu’à sa mort, le 9 juin 1960, dans le quartier de Länggasse.

Aujourd’hui quasiment tombé dans l’oubli, Martin Lauterburg, dont le style singulier est à la fois empreint d’expressionnisme et de classicisme, fut de son vivant un artiste très apprécié en Suisse et en Allemagne. L’exposition réunit une sélection d’œuvres de la collection de la Fondation Lauterburg qui fut créée en 1973 et intégrée cet été à la Fondation du Musée des Beaux-Arts de Berne. Sont présentées en complément des œuvres de Lauterburg provenant de la collection du musée. Les trente-cinq peintures et la douzaine de dessins et photographies exposés rassemblent des natures mortes florales, qui valurent à Lauterburg le nom de « peintre des géraniums » sous lequel il acquit sa notoriété, des portraits (notamment de Ricarda Huch), des paysages urbains, des œuvres religieuses, ainsi qu’une série de « tableaux d’atelier » où le peintre s’est représenté lui-même parmi des accessoires mystérieusement animés. Lauterburg se révèle dans ces peintures, le plus souvent précédées de mises en scène élaborées avec soin face à l’appareil photographique, comme un précurseur de l’art de la performance. Dans ces intérieurs clos surchargés d’objets qui le montrent vêtu des costumes les plus divers au milieu de poupées articulées et de masques, il interroge, tel un apprenti sorcier des temps modernes, la fragilité et l’ambiguïté de l’existence humaine. Comme peintre mais aussi comme photographe – un volet de l’œuvre qui ne fut guère étudié jusqu’à présent – Lauterburg chercha à saisir les interactions entre les choses animées et les choses inanimées et trouva dans une forme de réalisme magique un langage plastique qui n’a aujourd’hui rien perdu de son actualité.

Contact : Brigit Bucher, , T +41 31 328 09 21
Visuels : Marie Louise Suter, , T +41 31 328 09 53