Plongée dans le laboratoire de recherche de Bethan Huws

Comme Marcel Duchamp, Bethan Huws a la passion des jeux de mots, des idéogrammes et des symboles. C’est pourquoi l’œuvre de Duchamp, ses ready-mades et ses installations dotés de titres fortement allusifs et porteurs d’énigmes non résolues, l’incitèrent à tirer les fils et à décrypter leurs jeux de références cachées.

Une installation en forme de cartographie mentale
Les notes de recherche de Bethan Huws se composent de dessins, de notations manuscrites, de collages, de cartes postales, de notices de dictionnaires et de reproductions d’œuvres de Duchamp. Elles sont exposées ici pour la première fois à grande échelle sous la forme d’une vaste installation qui en dessine la cartographie mentale. L’artiste a conçu cette installation sur le modèle de celle qu’elle avait réalisée dans son atelier berlinois un jour qu’elle devait présenter les premiers résultats de ses recherches à un historien d’art. Les notes de recherche se rangent en deux catégories, les general files et les individual works. Les general files, disposés sur des tables, contiennent les notes sur les grands motifs de l’œuvre de Duchamp tels que Huws a pu les identifier, notamment la couleur, la géométrie, les chiffres, la peinture, les échecs, la religion chrétienne, les mythes, le spirituel, le poète et critique d’art Guillaume Apollinaire, et bien d’autres encore. Huws a réuni toutes les données sur l’apparition d’un thème à divers endroits de l’œuvre pour en comprendre la position dans le système duchampien. A l’inverse, dans les individual works, Huws se livre à l’étude d’œuvres spécifiques, parmi lesquelles Nu descendant un escalier (1912), le Grand Verre de La Mariée mise à nu par ses célibataires, même (1915-23) ou l’installation Etant Donnés (1946-66). Elle les replace dans le contexte plus large de l’œuvre, mais aussi dans celui de la culture française, afin d’en élucider, pas à pas, les différents niveaux de référence et de lecture.

Une proximité intellectuelle
Ce qui rapproche Huws et Duchamp, c’est notamment leur conception de l’œuvre d’art, qui, comme ils le croient, ne peut véritablement advenir que dans la compréhension des conditions de sa production. Seule l’interprétation, c’est-à-dire la compréhension de l’œuvre permet à quelque chose de devenir de l’art. Il s’agit donc pour Huws, non seulement de décrypter le sens de l’œuvre duchampienne, mais encore de mettre au jour les principes mêmes de la production de sens. Huws chemine en pensées sur les traces de Duchamp et en adopte, faisant retour sur l’œuvre, les méthodes et les stratégies. A la différence de ce qu’exigerait une recherche académique d’histoire de l’art, Huws s’autorise des lacunes et une subjectivité que laissent transparaître ses intérêts particuliers et ses déductions en rapport avec sa propre œuvre. Son étude approfondie de l’œuvre de l’artiste-du-siècle et les connaissances qui en sont issues sont une contribution non conventionnelle à l’histoire de l’art moderne et contemporain. L’artiste crée ainsi une œuvre sensible et poétique, pleine d’intelligence et d’humour, où s’élabore une réflexion sur les fondements de l’art.

Une artiste conceptuelle d’exception
Bethan Huws est née en 1961 à Bangor au Pays de Galles. Elle a fait ses études à Londres au Middlesex Polytechnic (1981-1985) et au Royal College of Art (1986-1988). Elle vit et travaille à Berlin. Elle s’est fait connaître par ses Word Vitrines, ses ready-mades, ses œuvres sculpturales et ses travaux vidéo. Des œuvres de cette artiste conceptuelle d’exception ont rejoint la collection du Musée des Beaux-Arts de Berne dès 1999.

Contact : Brigit Bucher, , T +41 31 328 09 21
Visuels : Marie Louise Suter, , T +41 31 328 09 53

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